L'intégration des bâtiments
Qu’ils soient réalisés de toutes pièces en carton ou en moulage de plâtre ou de résine, en bas relief ou en volume, à l’échelle stricte ou réduit pour donner un effet de perspective, nos bâtiments doivent être intégrés sur le réseau !
Mais au fait, l’intégration des bâtiments, c’est quoi au juste ?
Des maisons Jouef, montées sans peinture ni patine, posées sur le socle bien visible en plastique gris ne sont-elles pas finalement parfaitement adaptées à leur environnement : celui d’un réseau jouet typique des années 1970 !
Dans le cas qui nous intéresse ici, plus orienté modélisme d’atmosphère que train jouet, il faudra toutefois aller un peu plus loin. En reproduisant par exemple des rues pavées de différents appareillages ; en variant les formes : pose des pavés en arc de cercle, droit... ; en n’hésitant pas à varier les structures : pavés, dalles, macadam... ; en intégrant des caniveaux, des bordures de trottoirs, des plaques d’égouts, et différents regards, descentes de gouttières et autres installations spécifiques : raccordement électrique, téléphonique, évacuation des eaux, sans oublier le mobilier urbain, les arbres, les lampadaires...
En y regardant bien, il y en a des choses à reproduire dans les rues d’un village ou d’une ville, et toujours beaucoup plus visibles qu’un aménagement intérieur. Mais avant de penser à reproduire ces éléments en miniature, voyons donc de quoi il s’agit en réalité !
Nos maisons à pans de bois en bas relief sont maintenant disposées sur le réseau. Une Juva 4 stationne alors que chien et chat se regardent en chien de faïence !
Bien loin du concept de modélisme d’atmosphère, ces maisons Jouef sont pourtant parfaitement intégrées à leur environnement, celui d’un train jouet des années 1970 !
La recherche documentaire
Intégrer un bâtiment à son environnement immédiat, c’est souvent en fait tenir compte de l’époque que l’on souhaite évoquer : de la terre battue des routes et chemins des dernières années du XIXème siècle au tapis berlinois contemporain destiné à ralentir la circulation aux abords d’une zone dangereuse, il convient de ne pas se tromper. Pas de parabole sur les toits en 1950, pas de cabine téléphonique en 1900...
Tiens, en parlant de cabine téléphonique, objets désuets s’il en est à l’heure des e-watches, savez-vous réellement de quand date son apparition ?
Elles étaient pourtant bien présentes dans le paysage urbain et notamment aux alentours des gares dès la première moitié du siècle dernier !
Ainsi, sur le livret guide PLM de 1934 on apprend que les gares de Nice, Toulon ou Cannes étaient dotées de ces équipements ultra moderne.
Une rapide recherche sur internet et voilà la date de mise en service trouvée, ainsi que quelques photos des cabines d’époque suffisantes pour reproduire un petit détail parfaitement conforme et original…
C’est donc cela, la recherche documentaire. Et les mêmes questions peuvent se poser concernant la forme des poubelles, l’évolution de l’éclairage public, la hauteur et la forme des poteaux électrique ou téléphonique...
Mais alors, comment se constituer une documentation suffisante pour ne pas «trop» se tromper ?
En parcourant le site de la Médiathèque de l’Architecture et du Patrimoine par exemple. Le site Delcampe est également d’une aide précieuse. Il suffit par exemple de taper dans le moteur de recherche quelques mots clés comme des modèles d’automobiles caractéristiques d’une décennie, et vous obtenez une sélection de cartes postales et de documents qui ne sont certes pas tous d’un intérêt artistique majeur, loin s’en faut, mais qui sont toujours représentatifs de l’environnement d’une époque.
Les cartes postales, des documents qui fourmillent de renseignements et d’indications précieuses si on prend le temps de les regarder attentivement comme je vous le propose de le faire pour les trois exemples suivants :
Citroën Traction, fourgon Tub, Rosalie d’avant guerre, Renault Frégate composent ainsi une intéressante atmosphère des années 1950. On remarque par la même occasion le trottoir pavé en diagonale délimité de deux rangées parallèles, les bordures de pierres irrégulièrement disposées, traduisant un entretient approximatif. Les caniveaux sont pavés, que le revêtement de chaussée en macadam recouvre très irrégulièrement.
On remarque aussi la plaque en fonte à l’angle du trottoir, dont l’arrondi est encadré de deux rangs perpendiculaires. Autant de détails qui feront le bonheur d’un modéliste soucieux de réalisme, vous ne trouvez pas ?
La encore, Traction et Juva 4 situent la scène dans le temps. On remarque l’aspect très irrégulier de la surface du trottoir, ainsi que la rue intégralement pavée. Le poteau indicateur en béton du premier plan présente un profil blanc immaculé qui tranche avec l’aspect vétuste de l’ensemble de la chaussée. Un symbole de modernité donc.
Notons également la boite aux lettres en fonte à l’angle droit, les publicités en tôles émaillées, la fontaine au coin de la rue, les consoles télégraphiques ou électriques, les descentes de gouttières, la lampe de l’éclairage public protégée d’une simple tôle émaillée...
Voilà une chaussée dont le revêtement est enfin carrossable ! Nous sommes dans les années 60 avec la présence, entre autre, d’un break 404, d’une Simca 1500, d’une Simca 1000, de Renault Dauphine sans oublier l’incontournable Citroën 2 CV !
Bien avant que Georges Pompidou, en 1971, ne déclare qu’il ne faille adapter la ville à l’automobile, nous pouvons constater la présence de nombreux véhicules, tant voitures particulières que fourgons ou camions, dont un magnifique Saviem au premier plan et un Citroën U 23 dans le lointain...
Aujourd’hui, pour l’amateur H0iste, la gamme Retro 87 propose un assortiment complet de véhicules adaptés à ces époques.
Remarquons les panneaux routiers, toujours en béton pour certains, mais aussi en tôle émaillée, les symboles de la modernité évoluent donc avec le temps ; les poteaux EDF sont en béton, supportant un éclairage public en tube à incandescence, fini, la petite tôle émaillée !
Remarquons enfin le marquage des bordures de trottoirs en blanc et noir afin de matérialiser le carrefour et de signifier l’interdiction de stationner à ce niveau aux automobilistes qui en profitent naturellement pour se parquer sur le trottoir !
Une ballade au cœur de votre cité, appareil photo en bandoulière
Bon, vous allez me dire que tout cela est certes passionnant, mais qu’en ce qui vous concerne, vous n’êtes absolument pas sensible à toutes ces vieilleries de l’époque III ou plus anciennes encore, que vous êtes assurément l’homme du XIXème siècle, bien en phase avec son époque et décidé à reproduire sur son réseau une atmosphère contemporaine !
Et bien dans ce cas c’est encore plus facile, votre principale source documentaire sera l’observation de votre environnement, à la recherche des mille et une choses que l’on ne voit jamais, ou plus précisément encore que l’on ne prends jamais le temps de voir !
Je vous propose pour cela une expérience édifiante. Prenez une heure ou deux, et promenez-vous avec un appareil photo comme je l’ai fais dans les rues de Saverne pour réaliser la série de photos illustrant cette page !
Prenez le temps de détailler les rues, l’état des chaussées, les différences de revêtements, les raccords et rustines du macadam.
Regardez les trottoirs, appréciez les couleurs des pavés, leur forme, leur texture. Notez l’incroyable fourmillement de détails qui s’offrent à vous : plaques de formes et de tailles différentes, regards, bouches d’égouts, mobilier urbain, boites aux lettres, bornes d’incendie, parcmètres, hélas oui, parcmètres, poubelles, conteneurs divers pour le tri des déchets ménagers. La liste est longue, sans fin.
Mais tous ces éléments, pourtant bien présents dans notre environnement, les aviez vous seulement déjà remarqué ?
Notez d’ailleurs, que lors de ma séance de prise de vues dans la belle lumière d’un dimanche matin, nombreux furent les passants à se demander ce que je pouvais bien faire à photographier poubelles et plaques d’égouts, macadam et trottoirs...
Et pourtant, que de sujets passionnants à reproduire sur nos réseaux. Que de sujets indispensables à reproduire pour placer le train au cœur de son environnement. Et laissons donc les ricaneurs ricaner, d’autant que l’application des normes européennes concernant l’accessibilité de l’espace public aux personnes à mobilité réduite fera, et fait déjà évoluer le paysage urbain : un exemple typique, les bordures de trottoirs au niveau des passages piétons.
Actuellement, très souvent composé d’une véritable marche entre la chaussée et la surface du trottoirs, dans le futur, la norme sera l’abaissement du trottoir au niveau de la chaussée avec un seuil zéro, la présence d’une BEV (bande d’éveil à la vigilance) colorée encadrée de potelets réglementaires de 1.20 mètres de haut, avec têtes contrastées...
Il faudra donc en tenir compte pour l’aménagement de la place de la gare sur un réseau «contemporain» accueillant les nouvelles rames Régiolis qui seront forcément un jour proposées sur les rayons des détaillants !
Ce n’est qu’une rue, mais combien de détails à reproduire ?
Notez la variété des revêtements.
Cette bande verte matérialisant le passage vélo au niveau d’un carrefour est adaptée à un décor contemporain.
Notez la bande blanche perpendiculaire au trottoir. Elle matérialise le croisement de la rue pour les piétons.
Notez la bande d’éveil à la vigilance placée sur le trottoir avant le passage piétons légèrement surélevé.
Une grille d’égout le long d’un trottoir
Caniveaux de gouttières permettant de conduire les eaux vers le bord du trottoirs
Notez la plaque circulaire et les nombreux raccords de macadam sur la chaussée
Intéressante cette double rangée de pavée cerclant la plaque.
Une plaque en fonte au milieu de la chaussée
Un caniveau pavé conduit jusqu’à une grille. Notez les deux plaques en béton
Du goudron et des plumes !
Parfaitement convaincu qu’il y a là une carte à jouer pour améliorer le réalisme du réseau, nous prenons le cœur léger le chemin de notre détaillant préféré.
Et que trouvons-nous chez lui ? Des routes flexibles Heki, en mousse fine évoquant asphalte, béton et pavés que l’on peut panacher avec les textures Redutex ou les plaques Merkur ou Régions et Compagnies. Ce sont de bonnes bases, mais qui ne répondent pas à l’ensemble de nos besoins en la matière.
Et pour les trottoirs ? Quelques plaques Slater’s peuvent convenir, mais pour les bordures et passages piètons, il faudra se débrouiller avec un assortiment de baguettes que l’on mettra en forme.
Pour les accessoires par contre, la récolte est beaucoup plus intéressante, avec en premier lieu les indispensables accessoires Décapod : descentes de gouttières, plaques d’égout et autre regards, sans oublier les gammes des industriels comme Preiser, Viesmann, Busch, MKD ou Noch, mais aussi des artisans, comme Maquette Création, Artitec, ABE, AMF 87, L’Obsidienne, Sud Modélisme ou Haxo et la liste n’est pas exhaustive...
Mais dans l’ensemble, nous sommes très loin de pouvoir reproduire la totalité des structures rencontrées lors de nos pérégrinations, tant historiques que contemporaines. Très loin de pouvoir évoquer une chaussée en asphalte dégradée, craquelée, réparée de multiples rustines !
Alors, il faut la faire nous même. La base ici sera du sable extra-fin, tel que l’on en trouve comme matière première dans les verreries ou cristalleries artisanales. Pour plus de finesse encore, ou peut utiliser une poudre d’oxyde d’aluminium, la même que celle employée dans les sableuses miniatures. L’inconvénient est le prix assez élevé de cette poudre.
Le liant sera constitué quant à lui d’un médium acrylique mat, par exemple Lascaux référence 2032, disponible entre autre dans les magasins Le Géant des beaux arts, dilué à 50 % avec de l’alcool ménager.
Le sable est alors incorporé au mélange médium alcool jusqu’à obtenir une pâte onctueuse que l’on appliquera au couteau à peindre et que l’on lissera ensuite à l’aide d’une mini-taloche, une simple plaque de plastique épais fera l’affaire.
La surface ainsi traitée sèche vite, de l’ordre de 30 à 60 minutes. Il est alors possible de procéder à sa décoration à l’aide de peinture acrylique, pastels, terres à décor que l’on peut également directement incorporer au mélange.
Les fissures seront gravées à l’aide d’une pointe fine, quant aux irrégularités de la chaussée, elles seront évoquées en remouillant ponctuellement la zone à traiter à l’alcool puis en grattant la surface afin de l’affiner.
On peut ainsi évoquer sans difficultés les retouches et innombrables rustines que l’on trouve sur toute chaussée. Il sera également facile de faire la liaison avec des plaques du commerce imitant une zone pavée, ou un simple caniveau.
En écrivant ces lignes, je me rend compte que je n’ai pas encore évoqué la circulation d’automobiles avec un Faller Car System qui constitue véritablement un deuxième réseau dont il faut bien prévoir l’intégration.
C’est bien joli en effet de reproduire une chaussée hyper réaliste, mais pourquoi se priver d’une source d’animation intéressante ? N’est-il pas possible de combiner les deux ? Mais ici, le sujet est vaste et mériterait bien à lui seul un Hors Série. Il faut que je pense à en parler à mon Rédacteur en Chef !
La chaussée de cette rue menant à la gare du Mont Dore présente un état de surface largement marqué par le temps
Cet ancien nid de poule a été rebouché , mais à voir l’état de la chaussée sur la droite, un nouveau ne tardera pas à se former !
Le macadam paraît émietté tant les craquelures sont nombreuses.
Autre cas de figure, cette dépression le long du trottoir où la chaussée s’affaisse
Les diverses plaques d’imitation de chaussées pavées disponible dans le commerce peuvent être panachées afin de reproduire la grande diversité qui existe en réalité
Évocation d’une fissure sur la chaussée à l’aide d’une pointe.
Mise en place d’une bouche d’égout Decapod le long d’un trottoir reproduit par un simple carton contre collé gravé
Notez la variété des dalles formant le trottoir
Raccord entre une chaussée bitumée et une rue pavée
Des travaux ont été entrepris qui ont laissés cette cicatrice le long du trottoir jusqu’à la plaque au milieu de la chaussée
Notez les fissures et les trois plaques regroupées au centre
Le caniveau pavé suis la courbe du trottoir. Notez la bouche d’égout avec sa plaque sur le trottoir
Mais quelle intervention a entraîne la création de cette rustine ? Eau, gaz, électricité ...
La mise en place des bâtiments, enfin !
Quoi qu’il en soit, les routes et trottoirs étant maintenant achevés, avec ou sans Faller Car, il est enfin temps de mettre en place nos bâtiments !
Pourquoi pas avant d’ailleurs ?
Par facilité naturellement ! Il est plus pratique de traiter la surface d’une chaussée sans être gêné par le présence de maquettes qui restent par nature fragiles.
Par ailleurs, souvenons-nous que de nombreux bâtiments ne sont que provisoires sur la structure du réseau, en attente d’être remplacés par les maquettes définitives.
Pour ma part, je réalise toujours une sorte de talon à la base de mes construction, parfaitement illustrée sur les dessins de la cité ouvrière qui permets d’intégrer le bâtiment à la structure du réseau. Cela permet également de traiter facilement les pentes des rues, la base du bâtiment restant quant à elle parfaitement horizontale.
Mais à défaut d’être prévue dès l’origine, ce talon peut parfaitement être rajouté ensuite. Dans ce cas il s’agit d’un simple profilé Evergreen collé à la cyano.
La conception des modules devant ensuite recevoir ces bâtiments doit permettre au talon de s’engager dans le logement prévu à cet effet, la base du bâtiment reposant directement sur le trottoir.
Mise en place d’une baguette formant talon à la base de ce groupe de maisons traitées en bas relief
La fréquentation de ce trottoir est encore dangereuse, les piétons risques de tomber dans les coulisses du réseau !
Mise en place des bâtiments dans le logement qui leur est réservé.
La base de ce groupe d’immeuble repose sur le trottoir, la baguette collée précédemment permet un parfait maintient en place.